« Se retrouver ensemble, un changement radical »

, par AGUITON Christophe

Recommander cette page

Adhérent à la Ligue depuis 1970, membre de la direction dans les années 80 puis fondateur de SUD et d’AC !, Christophe Aguiton a été à l’origine d’un appel pour des « candidatures unitaires » de la gauche radicale aux élections présidentielle et législatives en 2007 (www.alternativeunitaire2007.org).

L’hétérogénéité du « non de gauche » à la Constitution ne rend-elle pas illusoire une candidature unique à la présidentielle ?

Le non ne formait évidemment pas un tout homogène, y compris à gauche, mais la dynamique de la campagne a été portée par les Collectifs du non et c’est dans cet arc de force que se discute la possibilité d’une candidature unitaire. Au Parti socialiste, la synthèse réalisée au Mans a réuni presque tous les dirigeants, y compris ceux qui s’étaient prononcés pour le non. Le débat concerne donc le PCF, la LCR, une importante minorité chez les Verts et surtout les Collectifs du 29 mai (ex-Collectifs du non, ndlr) et, au-delà, les centaines de milliers de militants et de citoyens qui ont été les acteurs des grandes mobilisations de ces dix dernières années et qui espèrent en une gauche qui soit autre chose qu’une simple force d’alternance !

Croyez-vous que, d’une façon ou d’une autre, la gauche radicale puisse faire un bout de chemin gouvernemental avec le PS ?

Il y a toujours eu dans la gauche française une césure entre un pôle radical et un pôle modéré. Récemment, il y a eu une gauche qui a accepté l’état d’urgence en novembre et une gauche qui s’y est opposée ; une gauche qui était pour le traité constitutionnel européen et une gauche qui l’a refusé, ou, sur l’échiquier syndical lui aussi divisé, des confédérations qui ont signé le dernier accord Unedic qui fragilise un peu plus la situation des chômeurs et d’autres qui l’ont rejeté. S’il y a un rassemblement à gauche du PS, il faudra discuter des mesures d’urgence qui répondent aux aspirations populaires. Le PS acceptera-t-il ces mesures ? Au vu de ses positions actuelles cela paraît impossible. Ce sera tout l’enjeu du débat politique à gauche dans les mois qui viennent. Car s’il n’y a pas de regroupement des forces qui défendent une réelle alternative nous aurons en 2007 un PS hégémonique à gauche et une série de « petits » partis qui devront décider s’ils acceptent d’être satellisés, comme l’ont été le PCF et les Verts sous Jospin.

Les réticences de la LCR s’expliquent-elles par le souhait de garder une « pureté révolutionnaire » ?

Je crois que se mélangent trois choses. D’abord, l’idée qu’il faut garder un pôle révolutionnaire pur de toute alliance, mais cela me paraît très marginal dans la LCR d’aujourd’hui. Il y a ensuite le poids du passé et les peurs de l’inconnu. Depuis 1968, date de la création de la Ligue, le PCF et la LCR ont été en opposition. Se retrouver ensemble à des élections, c’est un changement radical. Enfin, les réticences renvoient aux incertitudes encore nombreuses. Que fera le PCF, lui aussi soumis à des pressions identitaires et qui doit gérer ses alliances avec le PS dans les exécutifs locaux ? Combien, chez les Verts, accepteraient de se lancer dans une campagne unitaire ? Et, surtout, que feront les militants associatifs et syndicaux qui ont porté le non de gauche dans une élection où le poids des partis sera plus pesant ?

Si candidature unique il y a, doit-elle être celle de Bové ?

Ce n’est pas le moment d’aborder les questions de personnes. José Bové serait un bon candidat, Olivier Besancenot et Marie-George Buffet tout autant.

P.-S.

Propos recueillis par Eric Aeschimann.
Entretien paru dans le quotidien Libération, édition du vendredi 20 janvier 2006.

Pas de licence spécifique (droits par défaut)