Le 1er juillet 1907, à la Chambre des députés, le ministre français des finances Joseph Caillaux fait planer cette menace : « Je n’ai pas l’habitude de crier très haut mes projets [...] ni les négociations que je puis conduire, mais j’engage ceux de mes compatriotes qui partiraient d’un pied léger, avec leurs titres sous les bras, pour la Suisse [...] à n’être pas trop étonnés si dans quelque temps ils avaient une petite surprise. Dans tous les cas, je puis leur dire avec certitude que la réalisation d’accords [sur l’échange d’informations fiscales] n’est qu’une question de temps ; les accords aboutiront forcément quelque jour [1]. » Les démarches de Caillaux n’ont jamais porté leurs fruits.
« Le secret des banques n’est pas un dogme international [2] » : c’est par ces mots que, en octobre 1923 à la Société des nations (SDN), le chef de l’administration fiscale belge lance une offensive, appuyée par les représentants français, qui vise à obtenir de la Confédération un accord sur l’échange de renseignements fiscaux. L’offensive s’enlisera.
En octobre 1932, le gouvernement d’Edouard Herriot compte frapper un grand coup. Il fait perquisitionner les locaux parisiens d’une des principales banques suisses de l’époque, et met la main sur une liste de plus de mille ressortissants français — tous de la très haute société — qui fraudent le fisc avec son aide. Le scandale est d’importance, mais l’opération n’aura pas les résultats attendus. Elle poussera les autorités helvétiques à renforcer le secret bancaire en le protégeant spécifiquement par une loi adoptée en 1934. Et elle semble même avoir contribué à la chute du gouvernement Herriot, en décembre 1932 [3].