Rassembler les antilibéraux c’est indispensable, mais dans la clarté !

, par MAILFERT Martine

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Il existe de nombreux points d’accord entre les forces qui se sont retrouvées pour mener la campagne du « non » de gauche à la constitution européenne. Le programme adopté par les collectifs antilibéraux, le 15 octobre dernier, nous convient sur bien des aspects. Nous aurions souhaité plus de clarté sur le Smic à 1 500 euros net (et non brut), sur l’exigence de la rupture immédiate avec l’OTAN, sur la sortie du nucléaire, sur l’adoption du droit de vote de tous les résidents étrangers à toutes les élections, ou sur l’affirmation que le changement de société ne procédera pas seulement des élections mais essentiellement de mobilisations sociales d’une ampleur inégalée.

Mais le désaccord essentiel est fondamentalement politique. À quoi sert d’avoir le meilleur des programmes s’il faut le brader ensuite pour obtenir des accords avec le PS ? Cette divergence d’orientation politique porte sur les rapports avec la direction du PS. Elle n’est ni virtuelle, ni prétendue ou feinte. Elle est bien réelle. La direction du PCF l’a reconnu à de multiples reprises, dans les déclarations de sa secrétaire nationale, dans les textes adoptés par ses dirigeants ou dans les colonnes de l’Humanité. Par exemple, dans l’Humanité hebdo de la semaine du 30 novembre 2006, Pierre Laurent a raison de résumer ainsi la divergence : « Pour les uns, le PS est plus que jamais irrécupérable, le refus de gouverner, voire de constituer une majorité parlementaire avec lui doit devenir l’engagement solennel de la campagne qui s’engage. [...] Pour les autres, qui ne mésestiment pas le tournant constitué par la désignation de Ségolène Royal, la situation créée plaide au contraire pour un appel plus large que jamais au rassemblement ».

Lors des élections municipales anticipées de Bordeaux, le PCF local avait préféré être sur la liste avec le PS plutôt que sur celle du rassemblement antilibéral. Il avait été soutenu en cela par M.G Buffet, seule dirigeante de stature nationale à s’être déplacée à Bordeaux. C’était déjà un signe fort sur les choix de la direction du PCF.

Faute de n’avoir pas tranché et d’avoir longtemps fait croire qu’il n’y avait pas de divergence majeure au sein du mouvement du 29 Mai, on a préparé un autre type d’affrontement, celui sur le nom du candidat à la présidentielle. Pour notre part, nous n’avons jamais proposé Olivier Besancenot comme personnalité de rassemblement. Si nous n’avons pas été d’accord pour soutenir la candidature de Marie George Buffet, ce n’est pas simplement parce qu’elle est la secrétaire nationale du PCF et que sa candidature aurait été assimilée à celle de son parti. C’est surtout parce que nous sommes en désaccord avec l’orientation qu’elle défend. Une orientation qui, il est vrai sous d’autres formes et en d’autres circonstances, a déjà conduit son parti à gouverner avec le PS, pour le résultat que l’on connaît.

La direction du PCF a consulté ses militants pour savoir si Marie Georges Buffet devait être maintenue comme candidate antilibérale ou se retirer au profit d’un autre. Ce fut à nouveau un plébiscite pour maintenir sa candidature et faire éclater ainsi les collectifs antilibéraux. Au final, le PC se retrouve piégé dans le scénario que ses stratèges avaient imaginé : récupérer l’aspiration à l’unité des collectifs pour les amener sous sa direction dans l’ornière d’une « gauche plurielle bis ».

Nous disons les choses simplement : nous ne voulons pas gouverner avec l’équipe de Ségolène Royal. Nous ne voulons pas participer à sa majorité parlementaire. Nous ne voulons pas voter son budget. Pourquoi ? Pas par sectarisme, car nous partageons bien des aspirations à la transformation avec de nombreux militants, sympathisants et électeurs socialistes. Mais tout simplement parce que le programme libéral qui est le sien est incompatible avec le nôtre. Le PCF veut réunir « les deux gauches », la libérale et l’antilibérale. Nous maintenons que c’est inconciliable.

Dès lors, quel sens politique cela avait-il de vouloir allier, à la tribune des meetings pour la présidentielle, Jean-Luc Mélenchon, qui prône l’union des gauches au pouvoir, et Olivier Besancenot, qui la rejette ? C’est l’un ou c’est l’autre. Les deux ensemble, ce n’est pas possible. D’ailleurs Jean-Luc Mélenchon ne vient-il pas de se rallier à Ségoléne Royale reconnaissant maintenant « la centralité de la candidature socialiste » ! Comme l’affirme si bien l’acteur de théâtre, Philippe Caubère « on ne peut capituler devant un fantasme d’union ». Alors l’union, oui, mais dans la clarté. Sinon, les rêves de changement risquent de tourner au cauchemar de l’enlisement institutionnel. Le PCF a déjà donné dans ce registre et nous savons très bien ce à quoi cela conduit !

Nous sommes, plus que jamais, favorables au rassemblement durable de tous les antilibéraux conséquents, nous restons ouverts à la discussion, avec les militant(e)s communistes et celles et ceux des collectifs qui se situent dans la mouvance antilibérale. Cela vaut aussi pour qu’enfin émerge un outil politique efficace pour la lutte d’ensemble des salariés et de la jeunesse.

P.-S.

Article paru dans le Journal du Pays Basque, le 2 janvier 2007.

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