- JRV : Myriam, peux-tu en quelques mots te présenter aux lecteurs de Médiapart ? Quand et pourquoi as-tu rejoint le NPA ? Quel a été ton parcours avant d’y militer ?
J’ai rejoint le NPA au début de l’année 2008 à Lyon où je suis bibliothécaire. J’ai 31 ans et n’avais jamais milité dans un parti politique. Même si j’ai toujours été sensible aux problèmes sociaux je n’étais pas réceptive aux idées de certains de mes amis qui militaient à la LCR ou à Lutte Ouvrière.
Mon engagement fait suite à une longue période de mouvements sociaux que nous avons connus dans mon travail. Pendant un an nous nous sommes auto-organisés entre collègues avec l’aide des syndicats. S’en est suivi une grève qui a touchée les 15 bibliothèques du réseau de la Ville de Lyon. Puis un second préavis a été finalement levé. Nous avons obtenu la création d’une dizaine de postes, des améliorations de nos conditions de travail, et gagné une solidarité très forte entre collègues. Beaucoup se sont syndiqués par la suite et savent aujourd’hui qu’ils ont leur mot à dire dans leur travail et qu’ils peuvent eux aussi s’organiser.
Pour ma part je me suis syndiquée à la CGT, je participe à la vie du syndicat et milite sur le terrain. Cette activité syndicale va de pair avec mon engagement politique pour aller au bout de mes idées. J’ai participé à des formations que proposaient la LCR au moment de lancer le NPA et j’ai adhéré à la fois aux idées et au nouveau parti.
- JRV : Tu as vécu le processus de création du NPA sur Lyon. Quel est ton sentiment sur cette période ? Quels ont été les points forts des débats ?
Sur la ville de Lyon, il y a aujourd’hui 11 comités qui regroupent plus de 200 militants. Il y a une grande vitalité apportée par le processus du NPA : s’ouvrir à tous, militants associatifs, syndicaux, travailleurs et sans-emploi, retraités, jeunes, à tous ceux qui veulent changer ce système. Les comités sont des assemblées ouvertes où chacun apporte ses expériences, ses opinions, et ce qui se dégage ce sont des intérêts communs et des idées qui nous rassemblent.
À Lyon nous avons eu de longues discussions sur la notion de travail. J’ai été plutôt étonnée que ce terme monopolise autant les discussions. Des camarades pensent à juste titre que la condition de travailleur ne doit pas être la seule manière de nous définir. Les échanges ont permis de montrer que si nous employons souvent ce terme de travailleur c’est pour regrouper l’ensemble des personnes dont la seule source de revenu sera, est, a été ou serait de travailler. Et que l’horizon que nous projetons n’est pas seulement fait que du travail !
Je pense qu’il est important de comprendre notre situation, en tant que salariés, ce qu’est le capitalisme, basé sur les profits que génère notre travail et qui nous sont confisqués, et par là-même ce qui nous unit.
- JRV : Qu’attends-tu du congrès de fondation ? Quelle place souhaites-tu que le NPA prenne sur l’échiquier politique ?
Le congrès est l’aboutissement d’un processus que nous devons prolonger avec encore plus de succès à l’avenir et dans un cadre défini par les militants. Nous allons y gagner d’abord en visibilité puisque nous serons officiellement constitués, avec peut-être un nouveau nom, nous aurons des bases sur lesquelles nous appuyer, puis enfin une assemblée élue avec des représentants de tout le territoire.
La préparation du congrès a débuté en juin avec la mise en place d’un comité d’animation national provisoire qui a produit des textes pour fonder notre parti. Les comités se sont ensuite saisis de ces textes en produisant plusieurs versions qui seront discutées et soumises aux votes. Partout la préparation du congrès a d’abord été un moyen de se rencontrer, de se former, d’échanger, de débattre, de s’organiser, et enfin de prendre part au processus de création.
Le congrès fondateur est une nouvelle étape importante pour laquelle les militants se sont beaucoup investis. J’ai souvent été bluffée par l’attention, l’intérêt et l’engagement de toutes et de tous à s’impliquer et à travailler pour que ce congrès et ce nouveau parti soient une réussite.
Je vois le NPA, pour les milliers de militant(e)s que nous sommes, comme un moyen de nous rassembler, d’être vus, de constituer une force, de mener à bien nos idées et de les faire entendre.
Pour ce qui est de l’échiquier politique, je t’avoue que si le politique m’intéresse, c’est dans le sens de prendre en main nos vies et notre destin. Il est donc difficile pour moi de me positionner autrement qu’en rejet par rapport à un monde politique fait de partis complètement déconnectés des réalités et du quotidien de la population qui travaille ou qui est sans emploi, qui subit ce système. Mais heureusement d’autres partis et d’autres forces partagent nos combats et il est important que nous militions ensemble à chaque fois que cela est possible. C’est dans ce sens que nous accueillons positivement l’engagement de militants qui faisaient partie de Lutte ouvrière.
C’est vrai pour d’autres courants de pensée qui prennent place au sein du NPA.
- JRV : Les militants de la LCR étaient déjà divers dans leurs références. Mouvement pour la transformation sociale, l’écologie politique et l’altermondialisme y avaient pris une place importante. Que penses-tu des références qui animent le débat au sein du NPA ? Quelles sont celles qui te tiennent le plus à cœur ?
Ce qui est essentiel à mon avis pour la NPA c’est que nous gardions notre indépendance vis-à-vis des partis qui ne partagent pas les même bases politiques anticapitalistes, et bien-sûr vis-à-vis des institutions. Nous tirons notre force de notre indépendance. Pour faire court, nous ne voulons pas changer de président mais changer de mode de représentation. Nous dénonçons un système dont les instances servent les intérêts capitalistes et confisquent la démocratie. Si nous sommes radicaux c’est parce que cette société est injuste et que ce système crée des inégalités et des conditions de vie inacceptables. Nous sommes pour une société où la démocratie appartiendra à la population, où l’organisation même de la démocratie permettra à la population de faire ses choix politiques et de défendre au mieux ses intérêts.
Nous ne devons pas rentrer dans ce système en tant que parti politique « institutionnel » au risque de tout perdre. C’est souvent ce que nous nous efforçons d’expliquer à tous ceux qui nous reprochent de ne pas vouloir gouverner. Oui nous voulons que nos idées soient misent en pratique, et gouvernent et le plus vite possible !
Aujourd’hui avec la crise et la situation écologique, nous avons la démonstration que le système capitaliste nous mène à la catastrophe et qu’il est urgent de faire d’autres choix de société. Il nous reste à en convaincre tous ceux qui sont touchés par cette crise. C’est tous ensemble, salariés, jeunes, précaires, privés d’emploi, sans-papiers, que nous devons peser dans les luttes et créer un rapport de force qui nous soit favorable pour changer ce monde.