Lectures critiques

Usages et conséquences des mobilités à l’époque moderne

, par PATTIEU Sylvain

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À propos de Daniel Roche, Humeurs vagabondes. De la circulation des hommes et de l’utilité des voyages, Paris, Fayard, 2003.

LE CONTRÔLE DES MOBILITÉS
est un des fondements des mécanismes de classement et d’exclusion à l’origine de l’État-nation. Le contrebandier et chef de bande Louis Mandrin (1725 – 1755), qui écume le Dauphinois, fait partie de ceux qui, rejetés dans les marges et condamnés, tentent d’y échapper. Arrêté, roué vif à Valence, il n’en devient pas moins un héros et un symbole populaire. Il est représenté ici avec ses ballots de tabac de contrebande.
Dessin anonyme © Bibliothèque nationale.

L’idée d’écrire un livre sur la mobilité à l’époque moderne est venue inconsciemment à Daniel Roche, de son propre aveu, en lisant Tristes Tropiques, de Claude Lévi-Strauss, en 1955. La première phrase provocatrice de l’ouvrage, « Je hais les voyages et les explorateurs », a poussé l’historien à s’interroger sur les raisons du départ et du retour à l’époque moderne, si peu tendue vers la mobilité par rapport à notre époque où les distances rapportées au temps ont diminué vertigineusement. Davantage qu’à l’anthropologie, l’auteur emprunte cependant aux méthodes de la sociologie et de la démographie historique pour mener à bien une exhaustive et vaste entreprise : mesurer les effets de la modernité, et notamment de la constitution des États modernes, sur la mobilité des hommes et de leurs activités. Ce sont divers registres scientifiques qui se mêlent au service du projet : histoire culturelle et sociale, intellectuelle et matérielle, économique et démographique, longue durée quasi braudélienne et microstoria, histoire des élites (rois, noblesse, élites économiques et intellectuelles) et du peuple, récits de vie de personnages humbles, comme le compagnon vitrier Jacques-Louis Ménétra, de notables comme les frères Platter, de personnalités célèbres, comme Voltaire, Mozart, voire mythiques comme Mandrin, monographies de régions ou de villes, notamment Paris, études de groupes professionnels aux origines géographiques bien déterminées comme les maçons limousins, de groupes sociaux constitués par la fuite pour des raisons religieuses, comme les juifs séfarades et les protestants français après la révocation de l’Édit de Nantes, ou politiques comme les émigrés de 1789 – 1800. Daniel Roche se réfère pour cet essai doublé d’une monumentale synthèse à de nombreux travaux historiques concernant la période moderne, ainsi qu’aux théories de Pierre Bourdieu, Norbert Elias et aux pistes de recherche issues des travaux de Michel Foucault, notamment dans Surveiller et punir. L’étude de la mobilité de l’époque moderne est conçue comme apte à « produire connaissance » et « modification de l’être » : elle est l’occasion de réfléchir sur les fondements, bâtis à l’époque moderne, de nos sociétés.
Daniel Roche joue sur trois tensions transversales aux divers chapitres de l’ouvrage. Tout d’abord, le développement de la mobilité à l’époque moderne entraîne paradoxalement une réaction de méfiance envers cette modernité, une volonté des États modernes de la contrôler et de la limiter : la mobilité est alors directement à l’origine d’une inscription renforcée dans des territoires, dans la création et le renforcement de moyens de contrôle. Deuxième paradoxe, les sociétés modernes, présentées comme celles de l’immobilité du temps long par rapport aux sociétés du XIXe siècle et de la révolution industrielle, contiennent des éléments importants de mobilité, une mobilité intégrée dans le fonctionnement des sociétés, contrainte ou choisie, qui n’est pas le seul fait des élites cultivées. La mobilité s’inscrit donc dans la stabilité. Troisièmement, la mobilité n’est pas le seul fait du hasard : elle répond à un encadrement, à une propédeutique, à un objectif fixé en fonction d’un retour et de l’inscription dans ce qui est fixe et immuable : un territoire, des stratégies familiales. La mobilité est donc encadrée, codifiée. À partir de ces trois contradictions, Daniel Roche décrit et analyse des pratiques, des espaces, des moyens et une sociologie de la mobilité, inscrits dans une évolution temporelle du XVIe siècle à la fin de l’époque moderne, en mordant parfois sur le XIXe siècle.
L’objet de l’ouvrage n’est pas le voyage, le tourisme ou les migrations à l’époque moderne, mais bien une mobilité multiforme qui « oriente pratiques, représentations, imaginaires sociaux ». Il n’y a donc non pas une mobilité mais des mobilités diverses, qui concernent des couches différentes de la société : nobles, marchands, philosophes, bergers, collégiens, brigands, artistes et troupes de théâtre, marins, mendiants, aventuriers et agents secrets. Dans des sociétés d’Ancien Régime décrites comme fixes, immuables, où seul ce qui est identifiable, donc assignable, à un enracinement et à un territoire est fiable et digne de considération, la mobilité peut susciter une méfiance, elle est toujours un risque. Toute une tradition s’y oppose, dont témoignent les morales de nombreuses Fables de La Fontaine : celui qui part, espérant trouver mieux ou plus, est souvent cruellement déçu. Cette tradition morale des bienfaits de la clôture et de l’immobilité a ses échos dans la philosophie de Rousseau ou dans la littérature de Xavier de Maistre, talentueux auteur d’une parodie de récit de voyage, dont l’action tient place dans sa seule chambre. La bonne mobilité est alors une mobilité encadrée, obéissant à un objectif de retour, avec des règles de préparation et de déplacement. Les récits de voyage dont le nombre s’accroît particulièrement entre 1760 et 1800 sont caractéristiques, outre l’expansion des aires géographiques explorées, de la codification de normes du voyage. Ils sont marqués par une volonté de classement et une volonté utilitaire qui se retrouvent dans d’autres domaines et dans d’autres pratiques de la mobilité. Le voyage, ainsi, doit être préparé par des lectures, par le contact avec un mentor. Il est facilité matériellement par des lettres d’introduction auprès d’amis ou de membres de la famille, et doit se dérouler à un âge opportun, ni trop jeune pour ne pas en être corrompu, ni trop vieux pour être en capacité de modifier ses habitudes. Cette volonté normative fixe un but au voyage, celui du retour, car la connaissance de l’ailleurs est un élément, patriotique, de réflexion sur soi et sa propre société, à la fois allégorique (ce qui concerne l’autre) et tautégorique (ce qui concerne soi). Daniel Roche qualifie les récits de voyage de véritable « littérature de masse », qui permet aux amateurs de voyager sans quitter leur chambre. Ils doivent obéir à des normes de récit élaborées notamment par la presse à travers les exigences des comptes-rendus. Le développement des guides, instruments usuels de la minorité voyageuse, contribue également à fixer des normes et une maîtrise de l’espace culturel. La correspondance permet aussi de fixer une forme de restitution du voyage, préparée éventuellement au moyen de notes, de croquis, voire reconstituée des années après, selon un modèle à la fois de distraction et de connaissance et le principe d’une « esthétique de la négligence ».
L’encadrement de la mobilité ne passe pas seulement par le récit mais dans les pratiques : le fait d’aller et revenir s’inscrit dans « des usages et des symboliques de l’espace ». La recommandation est ainsi un moyen de vérifier et d’entretenir un capital social. Le séjour du voyageur suit un itinéraire précis, celui des routes de l’intérêt et du commerce pour les familles commerçantes. La correspondance permet de maintenir, dans la mobilité, les sociabilités habituelles, tout en étendant le jeu social par le voyage. Les destinataires des lettres ne sont pas privés mais collectifs. La mémoire individuelle s’articule sur la mémoire sociale pour une « mise en œuvre du monde ». La mobilité des notables s’inscrit dans celle du commerce et des affaires, dans des fonctions qui les conduisent à parcourir le pays ou à aller à la ville, moyen d’affirmer un pouvoir social et économique, de jouer un rôle d’intermédiaires entre villes et campagnes du fait de leur agilité spatiale. Celle des pèlerins ou des troupes de théâtre doit moins au hasard et aux individualités qu’il n’y paraît : leurs chemins croisent ceux de l’économie, des foires et des marchés. La mobilité des agents de l’État moderne est liée aux carrières de ces fonctionnaires, face aux besoins croissants de la monarchie en serviteurs qualifiés : agents du fisc, diplomates, ingénieurs des Ponts et chaussées, explorateurs. La mobilité du peuple est également une mobilité encadrée, comme le prouve l’exemple des maçons limousins qui se rendent régulièrement, pendant plusieurs mois, à la capitale pour travailler. Le voyage met en scène la solidarité de toute une communauté villageoise, dans laquelle les plus anciens encadrent le déplacement des plus jeunes, permettent l’insertion dans des réseaux de travail et de sociabilité dans la capitale. Au sein de la diaspora séfarade, suite à l’expulsion des juifs d’Espagne puis du Portugal, la circulation des hommes joue sur des relations induites par « une parenté latente qu’imposent le retour impossible et les impératifs culturels de l’intégration difficile dans les espaces d’accueil ».
Le contrôle de la mobilité est le revers de la modernité, avec une crispation des élites sur un phénomène qui leur échappe. Il s’agit de mesurer les mouvements, de tenter de les gérer et de les contrôler. Les États doivent, selon les conceptions mercantilistes, attirer la main-d’œuvre, la fixer, et en même temps refouler, faire payer et contrôler les étrangers. Les pèlerinages sont aussi soumis à cette volonté de contrôle de la part des États et des Églises, terrain d’une tension entre culture du peuple et des élites religieuses. Les frontières, les péages ou la production des papiers, avec le passeport, sont des éléments de ces dispositifs de contrôle. Le passeport est à la fois un élément d’identification et de fixation de l’altérité, dont l’usage s’impose progressivement à travers la période. Son pendant dans le monde du travail est le livret ouvrier, destiné à contrebalancer la mobilité de travail, nécessaire à la modernité, des classes dangereuses. En effet, pour les travailleurs de l’époque moderne, « partir, revenir, est alors une arme défensive et offensive », qui permet d’obtenir de meilleurs salaires. Le contrôle se développe avec une police qui est avant tout celle des étrangers, des forains, des pauvres. Le sort des Tsiganes est révélateur de cette évolution : l’augmentation de leur répression, qui remplace une relative tolérance voire une utilisation comme mercenaires au service des princes, est à l’origine d’une fixation identitaire, de l’élaboration d’une figure sociale figée. Le besoin de connaître, de classifier, entraîne une montée des stéréotypes nationaux et régionaux, véritable codification politique des caractères sociaux, mais aussi prémisse des sciences sociales. L’administration de l’État moderne est une administration des choses, des hommes et du temps, qui nécessite un personnel spécialisé et des connaissances précises. Au triptyque marchandise-argent-marchandise remplacé par argent-marchandise-argent, décrit par Marx, Daniel Roche substitue le passage du triptyque contrôle-connaissance-contrôle à connaissance-contrôle-connaissance. Selon la thématique de Foucault, le pouvoir produit le savoir, la connaissance subordonnée au contrôle devient une fin en soi. Ceux qui tentent d’y échapper, brigands, contrebandiers, fugitifs, hétérodoxes, sont rejetés dans les marges et condamnés aux galères, aux maisons de travail ou à une errance perpétuelle.
Si la mobilité inquiète, c’est qu’elle est aussi rupture et acculturation. Au niveau des élites, Daniel Roche décrit du XVIe au XVIIe siècle le passage d’une royauté mobile, pour laquelle le voyage royal est une prise de possession, un moyen de connaissance du royaume et d’évaluation de ses ressources, à une royauté sédentaire, fixée à Versailles autour d’une société curiale. Cette évolution a des effets sur la noblesse, déjà entraînée vers la ville par la modernité, dont une partie doit s’établir à la cour et quitter la province pour se rapprocher du roi. L’évolution est flagrante, du sieur de Gouberville, gentilhomme normand du XVIe siècle qui quitte peu son domaine, à la noblesse de la période absolutiste. La fixation à la cour s’accompagne de l’appropriation d’autres espaces avec le développement du voyage éducatif, moyen de former le jeune noble et de l’acculturer à la société curiale en lui faisant fréquenter d’autres cours en Europe. Il s’y familiarise avec la culture des apparences et l’esprit de conversation. Le voyage des étudiants, nobles ou pas, exige toujours une rupture, avec le milieu familial, avec les habitudes, et un sacrifice, notamment financier. Il permet néanmoins de constituer un capital de savoir et un capital social, s’insère dans des stratégies familiales, permet une mobilité sociale inséparable de la mobilité spatiale. Daniel Roche développe les conditions des voyages des frères Platter, deux demi-frères vivant à Bâle, nés du même père avec 40 ans de différence. Leur famille les envoie étudier à Montpellier, de 1552 à 1556 pour le premier, de 1595 à 1600 pour le deuxième. Quand Thomas, le cadet, s’en va, il n’est pas sûr de revoir un jour son père. Le voyage des frères Platter est préparé en famille, notamment par diverses recommandations. Il permet un élargissement de l’horizon scientifique et relationnel des étudiants, est un préalable à leur retour et à une prospère carrière médicale et universitaire à Bâle. Dans un autre registre, l’armée est décrite comme une « machine acculturante ». La modernité militaire des armées en voie de professionnalisation entraîne un développement de la discipline des corps, des traditions vestimentaires ou alimentaires, de la connaissance des peuples à des fins de contrôle pendant les campagnes. Les déserteurs qui tentent d’échapper à la conscription alimentent des migrations de travail, elles aussi acculturantes. Paris joue un rôle de creuset pour les maçons limousins, acculturés progressivement par des logeurs issus de la même région qu’eux et installés dans la capitale. Daniel Roche décrit leur situation comme un exemple de la manière de devenir parisien au XVIIIe siècle, véritable apprentissage de la ville pour ces ruraux. Le capital spatial de ceux qui ont déjà eu recours à des migrations de travail constitue un héritage immatériel et incite les fils à renouveler l’expérience. Le compagnonnage, pour les artisans, constitue à la fois une protection et une distinction, preuve de l’apprentissage de techniques et de l’appartenance à un corps reconnu. Le « tour » des compagnons est une occasion d’acculturation et de changements dans d’autres domaines que la profession : Jacques-Louis Ménétra, parti antisémite convaincu, est touché par les persécutions infligées aux Juifs et revient beaucoup plus tolérant. Des ateliers des artisans à ceux des artistes, les fonctions sont semblables. Ils contribuent à constituer l’art en tant que champ d’expression autonome, même s’il s’agit d’une autonomie inscrite dans la dépendance des grands. Pour ces producteurs de biens culturels et symboliques, la rupture spatiale est nécessaire pour des apprentissages qui permettent de développer le talent « dans le conformisme de la conduite et la maîtrise totale des valeurs du goût et des exigences des normes ». La singularité du génie est alors partie prenante d’un espace collectif. Les transferts culturels sont aussi permis dans le cadre du commerce. Les colporteurs itinérants, les marchés et les foires sont l’occasion de développer, dans les campagnes et les cités, le goût des apparences et des colifichets, à travers une modernité commerçante et culturelle, ou avec les troupes itinérantes de théâtre.
Si la carte du Tendre a toujours joué un rôle dans une mobilité ancienne, permettant de compenser le manque par le déplacement, la mobilité commerçante prend un essor inégalé avec l’époque moderne, du fait de l’augmentation de la demande et d’une amélioration des routes et des voies fluviales, à des fins économiques et militaires, par l’État moderne. Les foires et les marchés sont caractéristiques des sociabilités particulières qui découlent de la mobilité. L’auberge, fille du commerce plus que du voyage culturel, est un haut lieu de sociabilité, héritière de la tradition séculière de l’hospitalité, transposée du don à l’économie. Les voyages de la République des lettres sont, pour une élite cultivée, l’occasion d’éprouver l’idée d’une communauté égalitaire, qui fonctionne en réseau. La sédentarisation de Voltaire, « aubergiste de l’Europe », dans le pays de Gex, en est un exemple. Daniel Roche oppose, dans un chapitre particulièrement intéressant, son intégration européenne à l’attitude retirée de Rousseau qui refuse d’entrer dans le statut commun et se réfugie dans la mobilité restreinte de la promenade. Au-delà de l’opposition entre les deux philosophes, l’évolution de la sociabilité des francs-maçons est révélatrice du double mouvement d’ouverture et de fermeture qui caractérise la période moderne. La volonté maçonne de fonder une république universelle, espace de circulation libre et fraternel, réconciliation par les mœurs d’une élite distincte, est battue en brèche par le repli sur les traditions nationales, par les aspirations au cloisonnement et au retour au local.
Le travail de Daniel Roche relève bien en partie de la « culture matérielle dans la révolution des routes et de la vitesse qui débloque les espaces et le temps », mais il permet surtout de souligner « les pouvoirs spirituels et matériels qui utilisent et surveillent les formes de la circulation des hommes ». Il reconnaît à la mobilité une part de hasard et de contingence tout en l’inscrivant d’abord dans des déterminants sociaux et dans un usage social. Le maillage des dépendances et des relations, la production et la réception de la mobilité introduisent la dimension du mouvement dans les sociétés d’Ancien Régime. La rupture du XIXe siècle n’en est pas pour autant minorée mais mise en perspective en regard de ces éléments de continuité. La « croyance laïcisée en la capacité du déplacement à produire connaissance, modification de l’être, aptitude à négocier dans le commerce des choses et des hommes » est à l’origine de la possibilité pour les cultures de l’époque moderne de « s’ouvrir aux autres cultures », même si « elle suscite de nouvelles oppositions entre centres et périphéries, entre peuples des capitales et peuples des provinces, entre intégrés et exclus ». Le débat entre partisans de la mobilité, qui y voient une occasion de progrès et d’enrichissement, et ses opposants qui craignent un déracinement et une corruption des mœurs, témoigne selon Daniel Roche de « la crainte ancestrale envers tout ce qui vient d’ailleurs ». Le voyage, à l’époque des Lumières, était craint ou plébiscité car il était supposé permettre un retour critique sur son propre pays. De même, en explorant la société moderne, en dévoilant les mécanismes de classement et d’exclusion à l’origine de l’État-nation, l’auteur offre une distance et un regard critique par rapport au présent. Privilégier « une mobilité sans frontière et sans rupture, celle de la solidarité et non celle de l’errance », et des « transferts culturels profitables à tous, libres et non imposés par quelques rapports de force », fait partie pour lui du « devoir intellectuel et civique » de l’historien, car « la recomposition du monde » entamée au XVIIIe siècle n’est toujours pas achevée. Walter Benjamin, dans la IXe de ses Thèses sur le concept d’histoire, compare l’histoire à l’ange d’un tableau de Klee, « ses yeux écarquillés, sa bouche ouverte et ses ailes déployées » vers un passé dans lequel s’amoncèlent des ruines, poussé par une tempête qui est le progrès. Daniel Roche ne semble pas souscrire totalement à cette métaphore. Si ses yeux sont écarquillés par la richesse des sociétés modernes, le regard n’en reste pas moins critique pour déceler dans les progrès de la mobilité à l’époque moderne la part d’ombre qui en subsiste et qui s’abrite parfois derrière la « civilisation des mœurs ».