- Dominique Mezzi — Vous êtes la seule organisation à proposer la grève reconductible...
Annick Coupé — Tout le monde commence à comprendre le vrai projet du gouvernement. Et que ce n’est pas au moment de la discussion parlementaire en juin qu’il faudra réagir. Tout se joue dans la ou les semaines qui viennent. D’où la proposition de discuter de grèves reconductibles. Mais la reconduction ne se décrète pas. Cela doit se discuter dans les assemblées du personnel, et avec les autres syndicats. À part la FSU qui avance cette perspective, notamment dans le primaire, les confédérations n’en parlent pas. Cela se discute chez les cheminots, aux finances avec un appel unitaire au débat. Les choses mûrissent, c’est pour cela que nous avons pris la responsabilité de poser les enjeux clairement. Non pas comme un mot d’ordre venu d’en haut, mais pour que nos équipes passent à l’offensive dans le débat avec les salariés et les autres syndicats.
- Au vu de votre expérience interprofessionnelle, comment réduire le décalage entre privé et public ?
Le 3 avril, la coupure n’a pas été totale. Cela s’est vu dans les manifestations. Avec les 42 annuités, le privé est clairement concerné. Ce qui ne veut pas dire qu’il sera en tête de la lutte. Mais on ne peut ni en déduire une situation d’attente, ni espérer un niveau égal de mobilisation. Les conditions d’exercice du droit de grève sont plus difficiles. On peut être dans une situation où le secteur public sera à l’offensive, avec des participations aux manifestations. Dans la construction du mouvement, il y a la grève reconductible, mais aussi des rendez-vous généraux. Si la grève se prolonge, il faudra une autre date, entre le 13 et le 25 mai. Si la seule date est le 25, je crains que cela apparaisse comme un enterrement. De plus, l’Education nationale ne pourra rester seule.
- L’ostracisme vis-à-vis de l’union syndicale Solidaire n’est-il pas plus fort en ce moment ? Demandez-vous à participer aux réunions unitaires ?
Oui. L’appel pour le 1er février nous a clairement mis de côté. Nous avions demandé à rencontrer tous les syndicats. Et pour la première fois, nous avons rencontré FO et l’Unsa. Nous avons vu aussi la CGT. Mais nous avons senti qu’à partir du moment où la CFDT était dans le dispositif, nous étions exclus. La CGT disait vouloir respecter le cadre national. Les choses ont été différentes sur le 3 avril. Nous étions souvent dans les appels unitaires. Sur le 1er Mai, dans pas mal de villes, nous étions dans les appels. Mais nous avons globalement le sentiment d’être des « gêneurs », sur les retraites. Nous sommes les seuls à afficher l’idée d’une grève reconductible. Tout cela entre en résonnance avec des débats présents par exemple dans la CGT. Quant à FO, elle fait plus attention à l’unité, en évoquant la grève reconductible.