Poste, SNCF, Taser, NPA : Olivier Besancenot était l’invité de RTL

, par BESANCENOT Olivier

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Olivier Besancenot était l’invité de RTL mercredi matin. Le porte-parole du Nouveau parti anticapitaliste répondait aux questions de Philippe Corbé.

  • Bonjour Olivier Besancenot

Bonjour.

  • Ce n’est un secret pour personne. Vous êtes salarié de la Poste. Le 1er janvier, la Poste va perdre son dernier monopole, le marché des courriers de moins de 50 grammes va être ouvert à la concurrence. Ça fait plusieurs années que vous dénoncez la privatisation de la Poste. Mais franchement, est-ce que ça va changer grand chose dans le quotidien des Français, des usagers à partir de samedi ?

Non, sur cette date-là, non puisqu’il s’agit en fait de l’activité ménage, en gros, des particuliers à particuliers. Ce n’est pas là où la concurrence va se ruer en premier parce que ce n’est pas là le secteur le plus rentable de l’activité. Et comme vous le savez, la libéralisation et la privatisation, ça n’a qu’un seul but : c’est laisser à l’Etat et aux Pouvoirs Publics les structures les plus coûteuses et ouvrir à la concurrence là où il y a de l’argent à se faire. Ceci étant, c’est une date à inscrire d’une pierre noire dans le calendrier sans mauvais jeu de mots de l’histoire des Services Publics. C’est des étrennes empoisonnées que la commission de Bruxelles et le gouvernement nous envoient sachant qu’à partir de maintenant, on sait que c’est l’arrêt de mort en tant que tel d’un Service Public postal avec, en plus, un paradoxe, qu’il y aurait plus une provocation pour les usagers qui nous écoutent, c’est qu’il y a des années, des années, on nous a expliqué qu’il fallait fermer les centres de tri, fermer les bureaux de poste de proximité parce que c’était la faute à internet, c’était la faute du progrès, il y avait de moins en moins de courriers ...

  • C’est ça d’abord la concurrence plus que la poste néerlandaise ou la poste allemande, c’est ça : c’est internet, aujourd’hui, la concurrence pour le petit courrier comme ça.

Eh bien moi je n’y crois pas, d’abord parce que vous savez, c’est paradoxal. Internet, c’est vrai que ça retire une partie du courrier mais c’est vrai aussi que ça fait une relance d’activités supplémentaires quand vous faites des opérations ....

  • Côté livraisons.

Voilà, par exemple. Donc, le vrai problème, c’est qu’on nous a fait croire tout ça et on va se rendre compte dans quelques mois, dans quelques années, qu’on va embaucher des milliers d’emplois dans d’autres secteurs, dans d’autres secteurs concurrents de la Poste, c’est-à-dire qu’il y aura probablement par rapport à il y a dix ans, toujours autant de personnes pour trier le courrier, simplement ils seront dans des opérateurs différents. Et on va jouer évidemment sur la concurrence des salariés entre eux. Je crois que le bon sens voudrait qu’on fasse qu’un seul et même service public postal en réquisitionnant l’ensemble des opérateurs et plus que ça, encore, il faudra un Service Public postal européen puisque la Poste se déguise à l’étranger, en opérateur privé pour faire la concurrence à d’autres opérateurs publics. Idem dans d’autres pays. Donc, il devrait y avoir une coordination immédiate de tous ces opérateurs pour faire un premier pas vers un Service Public postal. Je crois que l’ensemble des postiers et des usagers surtout y trouveraient leur compte.

  • Olivier Besancenot, un autre sujet qui concerne une grande entreprise publique : le périple de plus de 24 heures de ces 600 voyageurs à bord du train Strasbourg - Port Bou, Nice. Les syndicats dénoncent la casse du service public. Est-ce que ce n’est pas plutôt tout simplement une succession exceptionnelle d’incidents liés à Noël, à la neige, à tout ça ?

Non, mais de la neige et Noël, il y aura toujours. Le problème, c’est de savoir si on a les structures en effet, publiques pour faire face à des catastrophes naturelles, à des intempéries et on ne peut pas, d’un côté, privatiser, démanteler, déstructurer, retirer du matériel pour faire un peu plus de profit et supprimer des milliers d’emplois sans qu’à un moment donné, il n’y ait pas un impact service usagers. C’est le cas dans ce qui vient de se passer, en effet, je joins ma voix aux syndicalistes dans le cadre, par exemple, de ce train qui a été bloqué pendant des heures et des heures. C’est vrai plus généralement dans la pagaille qu’on a vue au moment des chutes de neige ...

  • Ça a mieux marché, par exemple, à la SNCF qu’à Air France Aéroports de Paris !

Oui, ça dépend dans quel secteur. La preuve, il y a encore quelques jours. Et puis, de façon plus globale. Vous privatisez les aéroports, qu’est-ce qu’il reste aujourd’hui de la DDE ? Qu’est-ce qu’il reste de l’équipement ? Qu’est-ce qu’il reste des structures d’entretien aujourd’hui de la SNCF ? Plus grand chose ; et ça, à un moment ou à un autre, ça a un impact. Et si vous vous mettez du point de vue des capitalistes, eh bien c’est vrai que l’entretien , la sécurité, ce n’est pas la priorité. Il y a des marges de manoeuvre. On peut se faire du profit ; et c’est là où il faut se les faire. Par ailleurs, je dirais il y a un aboutissement dont il faudrait discuter : ce démantèlement des services publics, c’est l’absurdité aujourd’hui de ce qu’on nous vend. Je rappelle que jusqu’en 91, par exemple, le secteur que je connais bien, c’étaient les PTT. France Telecom et La Poste, ça faisait la même activité. On nous a expliqué qu’il fallait séparer tout ça pour cause de rationalité. Aujourd’hui, que fait la Poste dans le cadre de la compétition ? Elle va faire de la téléphonie mobile. C’est-à-dire qu’elle va concurrencer directement France Telecom.

  • Elle va refaire du téléphone.

Voyez, le comble de l’absurde. EDF va fabriquer du gaz pour concurrencer GDF. GDF va faire de l’électricité.

  • On a des champions mondiaux de l’énergie : GDF Suez et EDF, français, voilà.

Ecoutez, super !!! En tous les cas, du point de vue des tarifs, je pense que personne ne s’y retrouve et c’est là le bilan qu’il faut tirer.

  • On a une électricité moins chère qu’à l’Etranger, par exemple !

Oui, enfin, ça dépend lesquels. Et puis, j’invite justement à tous ceux qui nous écoutent que ça soit dans le domaine de l’énergie dont vous parlez, dans le domaine des transports ou dans le domaine de la Poste dont on parlait, de regarder de près toutes les études d’impact des libéralisations et des privatisations des Services Publics qui ont été commandités au niveau du Parlement européen. Et vous verrez que non seulement, ces privatisations et ces libéralisations se traduisent par des suppressions massives d’emploi mais qu’en plus, il y a une augmentation systématique des tarifs. Donc, c’est pour ça que personne n’y trouve son compte et c’est pour ça que je crois qu’il faut des perspectives sociales et politiques. Il y a aujourd’hui de nombreux conflits, par exemple, à La Poste. Je pense aux salariés de Marseille 2 qui sont en grève depuis plus de 80 jours, à plus de 100 % de grévistes — l’encadrement lui-même fait grève — ça veut dire qu’il y a un problème. Eh bien la direction de La Poste noue même pas de vraies négociations. Et puis, il faudra aussi des perspectives politiques, ça c’est pour la Gauche que je m’adresse.

  • On en reparle dans un instant. D’abord, Olivier Besancenot, le Parquet de Nanterre vient d’ouvrir une information judiciaire après le décès d’un Sans Papier qui avait reçu deux décharges de taser, fin novembre. Des policiers cherchaient à le maîtriser avec ce pistolet électrique.Il y a deux ans, la société Taser avait tenté, sans succès, de vous faire condamner pour diffamation. Est-ce que vous rediriez, aujourd’hui, le taser aujourd’hui peut tuer. Est-ce que vous demandez le retrait total du taser ?

Oui, je le redirais puisqu’en effet, la Justice m’a donné gain de cause. La société taser comme vous l’avez souligné, m’avait attaqué. Elle a perdu. Il y a des rapports très sérieux d’Amnesty International qui expliquent que l’utilisation de cette arme aux Etats Unis et au Canada a suscité de façon directe ou indirecte des décès ...

  • Ce que conteste la société.

Ce que conteste la société. Mais on a la convention, par exemple, de prévention de lutte contre la torture de l’ONU qui dit explicitement que le taser peut tuer. Donc, tout ça, ça me fait dire une chose, c’est qu’il faut un moratoire sur l’utilisation de cette arme. Un moratoire, ça veut dire ce que ça veut dire. On prend le temps collectivement, publiquement, démocratiquement de discuter pour savoir si en généralisant l’utilisation de cette arme comme on le fait en France depuis 2005, on rajoute un problème au problème.

  • Vous savez bien ce que disent les syndicats de policiers ! Le taser c’est un supplétif aux armes à feu. Si on utilise davantage d’armes à feu, il y aura davantage de blessés, peut-être davantage de morts ?

D’abord, tous les syndicats de police ne disent pas ça. Ca, c’est la société Taser, c’est en effet son grand argument de communication, c’est dire : c’est l’alternative à l’arme à feu. Mais sauf si c’est l’alternatif, c’est de choisir entre une arme qui peut tuer et une arme qui peut tuer, vous avouerez que ce n’est pas franchement une alternative. Donc, à un moment donné, ça fait maintenant des mois et des mois, je ne suis pas le seul, à tirer la sonnette d’alarme et j’invite, en effet, aujourd’hui le gouvernement à faire ce moratoire. Au moment du procès dont vous parliez, on a eu une discussion dans l’enceinte du Palais de Justice où chacun a fait appel aux experts, aux contre experts. Ce que j’aimerais simplement c’est que ce débat auquel j’ai pu assister, l’ensemble de la société puisse y assister et on constaterait qu’en effet, il y a nécessité d’avoir ce moratoire au plus vite comme le réclame, par exemple, Amnesty International.

  • Olivier Besancenot, c’est vrai que vous quittez vos fonctions de porte-parole du NPA et que vous ne serez pas candidat, peut-être, à la présidentielle ?

Non, la question de la présidentielle, on la traitera en juin prochain. En revanche, vous avez raison, début du mois de février, on a notre congrès au niveau du Nouveau Parti Anticapitaliste et on va faire émerger dans la direction qui sortira de ce congrès de nouveaux porte-paroles...

  • Vous êtes lassé, vous en avez un peu marre ?

Absolument pas lassé. Alors là, je rassure tout le monde.

  • Les résultats électoraux un peu décevants vous découragent ?

Ah non, d’abord parce que depuis, vous avez assisté à un grand mouvement social où on estime qu’il y a eu entre 7 et 8 millions de personnes qui ont, soit manifesté, soit fait grève. Ça, ça a remis le NPA en selle. Et puis, vous savez moi je suis un combattant, je suis un militant, j’ai les pneus gonflés à bloc pour combattre les injustices, les politiques libérales dont on parlait sur les Services Publics, les licenciements. Donc, il faudra continuer à compter avec moi et avec ma voix, je vous rassure.

  • Merci Olivier Besancenot. Vous étiez en direct depuis le véhicule technique puisque vous travaillez ce matin, vous étiez l’invité de RTL du bureau de poste de Neuilly.