Selon Lutte ouvrière, « la LCR ayant décidé d’appeler à voter pour la gauche gouvernementale (...) nos politiques seront, sur des points majeurs, très différentes, voire opposées ». Le jugement semble définitif mais il n’explique pas les vraies raisons du « renoncement » de Lutte ouvrière.
Les désaccords entre la LCR et Lutte ouvrière sur le second tour sont connus depuis longtemps. Désaccords qui n’ont pas empêché une discussion mutuelle pendant plus de six mois-de janvier à juin-pour envisager la possibilité de listes communes.
Lutte ouvrière est pour l’abstention. La LCR, en général, appelle à battre la droite. Il ne s’agit pas dans cette consigne de vote de soutenir les partis de gauche, ni même de valoriser leur politique vis-à-vis de celle de la droite, mais simplement de marquer notre solidarité avec la majorité des classes populaires qui rejettent la droite, et de ne pas renvoyer dos à dos électeurs de gauche et électeurs de droite. Ni plus, ni moins. Les élections municipales posent un problème particulier. Les révolutionnaires peuvent-ils être indifférents au fait que, dans une série de communes ouvrières, l’élection d’équipes municipales de droite signifie la suppression d’avantages sociaux et une dégradation des conditions de travail pour les employés communaux ?
Aussi, l’essentiel pour la politique électorale des révolutionnaires n’est pas le second tour mais le premier, où nous pouvons défendre l’ensemble de notre politique, comme nous l’avons fait durant la campagne électorale européenne, puis au Parlement européen. Parce que les 2 organisations défendent les mêmes revendications fondamentales d’un plan d’urgence au service des travailleurs et une politique d’opposition déterminée à la politique du gouvernement, elles auraient pu préparer ensemble les élections municipales.
Pour la LCR, la défense commune de cette politique l’emporte sur les désaccords concernant le second tour. C’est dans cet état d’esprit que, contrairement à ce que prétend la direction de LO, la LCR a proposé un compromis reprenant les termes de l’accord que les deux organisations avaient réalisé aux élections municipales de 1983. La LCR proposait que « les listes communes, ainsi que les têtes de liste, ne donnent aucune consigne de vote pour le second tour, chacune des deux organisations étant libre de donner sa propre position ». Et nous ajoutions, dans notre dernière lettre : « C’est un véritable compromis, d’ailleurs plutôt favorable à votre position, puisqu’une liste qui ne donne pas de consigne de vote ressemble plus à une liste qui n’appelle pas à battre la droite que l’inverse. » Quant aux fusions de listes au second tour, nous proposions que les situations soient étudiées au cas par cas.
En rejetant toutes les propositions de compromis, LO tombe dans un travers étonnant : la divergence sur les consignes de vote au second tour l’emporte sur ce qui nous réunit dans la défense d’un programme anticapitaliste. Cet ultimatum est d’autant plus surprenant qu’en général, LO se fait plutôt discrète sur le second tour, voire s’apprête à ne pas rejeter dos à dos des listes de droite et celles conduites, par exemple, par le PCF, même si ce dernier soutient la politique du gouvernement. Preuve donc que les vraies raisons du refus de LO ne sont pas liées au second tour.
Lutte ouvrière a refusé d’ouvrir les listes à tous ceux qui, en accord avec une plate-forme nationale LO-LCR, voulaient y participer. Dans la même veine, elle a refusé que des militants associatifs, syndicalistes, des sympathisants qui acceptent une plate-forme nationale LO-LCR participent à l’élaboration de plates-formes locales. En refusant l’ouverture des listes à ceux qui peuvent être entraînés par la dynamique d’une activité commune, la direction de LO fait preuve de sectarisme. L’unité LO-LCR avait suscité un nouvel intérêt chez nombre de travailleurs qui se posent le problème d’une alternative politique à la gauche plurielle. Comment unir les 2 organisations sans associer ceux qui les soutiennent ? Ce sont d’ailleurs les interrogations et critiques formulées par la fraction l’Etincelle de LO.
En fait, les blocages de LO sur le 1er tour renvoient à la décision de geler la dynamique LO-LCR engagée lors des dernières européennes, et de cantonner strictement la collaboration des 2 organisations au Parlement européen. Cette incapacité de LO n’est pas nouvelle. Elle s’était déjà manifestée dans le refus d’avancer des propositions unitaires après la percée électorale d’Arlette Laguiller aux présidentielles de 1995. Elle se confirme, malheureusement, alors qu’il existe dans une série de pays d’Europe-Portugal, Grande-Bretagne, Danemark-de nouvelles possibilités pour la gauche révolutionnaire, notamment face à la crise des partis communistes. Aujourd’hui, LO prendrait une lourde responsabilité en refusant de poursuivre une politique commune.
La LCR sera présente aux prochaines élections municipales, dans le maximum de villes, dans le cadre de listes LCR « 100% à gauche », ou dans le cadre de listes unitaires contre la droite et la politique gouvernementale.
Mais nous ne nous résignons pas à la division entre nos deux organisations. C’est dans ce sens que nous proposons un accord de non-concurrence, un appel à voter les uns pour les autres, qui marque la volonté politique commune de continuer ce qui a été entrepris...
Municipales : les raisons du refus de LO
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Le comité central de Lutte ouvrière a décidé de refuser de constituer des listes communes avec la LCR pour les municipales de 2001. Commentaires.