Présenté par le Lehendakari (président du gouvernement basque) Ibarretxe, dont il a pris le nom, le « plan Ibarretxe » est une proposition de réforme de l’autonomie basque dans l’État espagnol, présentée pour approbation au Parlement basque en tant que projet de loi par les trois partis qui forment le gouvernement autonome basque : le Parti nationaliste basque (PNV), un parti du centre, obligé par les circonstances de maintenir des politiques populistes et démocratiques radicales ; Eusko Alkartasuna (EA), une scission du PNV d’orientation nationaliste social-démocrate ; et la Gauche Unie du Pays basque (IU-EB). Ces trois partis disposent de la majorité au sein du Parlement basque, mais ont besoin des votes de Batasuna (le parti auquel l’ETA délègue sa représentation politique) pour obtenir la majorité qualifiée. Il n’y a aucune garantie que Batasuna accorde cet appui au plan Ibarretxe.
Le parti populaire (PP, dirigé par l’actuel premier ministre espagnol, José-Maria Aznar) et le Parti socialiste (PSOE), qui représentent ensemble 40 % de la Chambre basque, s’opposent à ce plan, partant d’une position nationaliste inverse. Leur unité fondée surtout sur le nationalisme espagnol opposé à l’indépendantisme basque, commence à se fissurer à partir de la nouvelle scène politique ouverte en Catalogne, où les socialistes catalans collaborent avec les nationalistes de droite (CiU), de gauche (ERC) et de gauche fédéraliste (ICV-EUiA) pour une réforme de l’autonomie catalane dont les caractéristiques ressemblent à la proposition basque. La somme de ces deux mouvements convergents des nationalités historiques — basque et catalane — met à l’ordre du jour une réforme du modèle de l’État espagnol.
Le « plan Ibarretxe » sera soumis à une consultation citoyenne (référendum) qui, même si le gouvernement espagnol refuse d’en reconnaître le résultat, ouvrira un conflit de légitimité, forçant à la recherche d’un accord entre les parties ou, en son absence, à la désobéissance civile des institutions basques.
Enfin, le recours au référendum et à l’éventualité de la désobéissance civile des institutions basques, apparaît d’ores et déjà comme une alternative à la violence. Il est possible que l’ETA s’en saisisse pour annoncer une trêve. Le gouvernement basque pourrait également organiser une consultation citoyenne autour de deux questions : une sur la proposition de réforme de l’autonomie (proposition dirigée contre l’État espagnol) et une deuxième sur la violence politique (proposition dirigée contre l’ETA). Le « plan Ibarretxe » apparaît ainsi comme une initiative visant à rompre le cercle vicieux des deux violences minoritaires — celle de la répression étatique espagnole et celle de l’ETA — qui bloque depuis des années la question nationale basque. (réd.)
1. Remarques sur la nature de la proposition de la souveraineté partagée de l’Euskadi en Espagne. La substance de la proposition d’Ibarretxe réside dans la modification des rapports Euskadi-État, ce qui fait que tout jugement que l’on porte sur elle renvoie nécessairement au modèle de l’État. Je dis cela en passant, car c’est justement pour cette raison qu’il a été critiqué par ses détracteurs les plus fervents. Mais cette proposition relève également de l’aspiration visant une régulation des relations internes de la société basque. On doit ainsi l’apprécier de tous les points de vue qu’il concentre, à savoir :
— en ce qui concerne le changement du modèle de l’État (proposition de souveraineté partagée) ;
— en ce qui concerne la manière de poser les questions relatives à l’identité nationale, aux droits de citoyenneté, à la territorialité et à l’institutionnalisation politique d’Euskal Herria (nation basque) ;
— et enfin, en ce qui concerne le modèle de société.
Toutes ces questions se réfèrent au contenu de la proposition. Je vais présenter ici un premier avis, que je n’hésite pas à qualifier de « soutien critique », y compris en ce qui concerne une appréciation positive de la procédure choisie pour son entrée en vigueur (consultation des citoyens précédant la négociation avec l’État). Je suis pleinement conscient toutefois que le conflit politique qui s’ouvre exige à son tour un avis sur d’autres questions, relatives à la viabilité de la proposition, aux majorités nécessaires, aux rapports de forces et aux alliances politiques permettant de l’investir. Mais chaque chose en son temps.
2. C’est une proposition démocratique de construction nationale basque perceptible non seulement dans la procédure (consultation citoyenne), mais aussi dans le contenu qu’elle propose de donner aux formes d’organisation interne de la société (les droits et les libertés). À la différence de la majorité des États-nations qui se sont construits en recourant à la violence et à l’assimilation nationale-culturelle des peuples dominés par la nationalité dominante, les nationalités sans État peuvent être construites comme nations libres dans l’Europe du XXIe siècle, sans avoir besoin de commettre contre leurs minorité intérieures les mêmes agressions qu’elles ont souffert au cours de l’histoire. La construction nationale basque peut et doit être faite par des moyens démocratiques ; cela signifie non seulement à partir de la volonté librement exprimée de tous les citoyens, mais aussi sur la base du respect le plus scrupuleux du droit de ses minorités. Le projet Ibarretxe offre une intention et un résultat acceptable de ce point de vue.
Dans son préambule il définit le peuple basque comme « un peuple ayant une identité propre » mais il ne tente pas d’entrer dans la définition des critères de cette identité, car tout codage de l’identité tend à être partiel, et par conséquence excluant envers ceux qui ne se retrouvent pas dans une telle définition. En laissant indéfinie la spécificité basque, les attributs qu’on pourrait lui donner restent ouverts à la libre volonté de chaque personne, éliminant ainsi un des principaux obstacles pour l’intégration des citoyens. La définition du peuple basque suit les mêmes critères civiques (républicains), en opposition aux critères ethniques, en affirmant que « le peuple basque est composé de tous les citoyens recensés sur son territoire », par conséquence indépendamment de l’idéologie, de l’origine et de l’identité nationale de chacun. Nous sommes là en présence d’une définition civique de la nation, propre à la pensée démocratique et libérale. C’est à partir de cette définition qu’est décrite l’aire géographique (les sept Territoires historiques des deux côtés des Pyrénées) pour lesquels, au lieu de réclamer un projet politique commun (des institutions unifiées), le plan Ibarretxe reconnaît « le droit des citoyens recensés dans chacun d’entre eux de décider de leurs relations mutuelles et de leurs relations avec d’autres ».
Ces définitions générales offrent une conception pleinement démocratique du droit national (la liberté de décider), du sujet du droit (tous les citoyens recensés) et du cadre de décisions (les territoires de chaque administration politique séparément : Navarre, Euskadi et le Pays basque d’Iparralde — « français »), offrant à partir d’eux une formule d’articulation politique du territoire qu’il administre (Euskadi) avec l’État espagnol, basée sur l’idée de la souveraineté partagée, qui est également respectueuse des identités plurielles de la société basque.
3. Souveraineté basque dans un modèle confédéral de l’État. Le nouveau Statut de libre association constitue une mise à jour des revendications nationales tenant compte des temps politiques nouveaux. Il s’agit d’une proposition inspirée par la sentence du Tribunal suprême du Canada en ce qui concerne l’indépendance du Québec. De nouvelles compétences en matière de Justice, de la Sécurité sociale, des Relations du travail et de la gestion des ressources propres pour les infrastructures de transport et des communications sont revendiquées pour le gouvernement autonome. Elles s’ajoutent aux compétences déjà obtenues en ce qui concerne la collecte des impôts, l’éducation, la culture, la santé et l’ordre public. Une participation directe du gouvernement autonome basque à toutes les questions européennes qui le concernent directement est également revendiquée. Mais le plus important, ce qui constitue le substance de la proposition, c’est le transfert de la souveraineté politique des Cortes espagnols au Parlement basque et la proposition d’une Commission paritaire d’arbitrage — garantie de « l’accord entre égaux » — qui remplacerait l’actuel Tribunal constitutionnel dans le domaine des conflits qui pourraient apparaître entre les parties. On nous propose ainsi de passer de l’actuelle autonomie octroyée (la Constitution espagnole ne reconnaît pas la souveraineté des nationalités) à un nouveau « Statut de libre association », qui implique nécessairement un système politique de souverainetés partagées.
L’originalité de la proposition consiste dans l’adaptation des vieux projets nationaux (tant le projet de restauration du droit statutaire que le projet indépendantiste) aux théories modernes du modèle confédéral de relations politiques entre les peuples (la souveraineté partagée ou la souveraineté du possible dans le nouveau contexte de l’Union européenne).
L’idée de la « nation associée » est certes apparentée jusqu’à un certain point aux traditions fédérales, mais elle en diffère sur des points importants qu’il est utile de souligner. Elle est formulée « d’en bas », à partir des racines nationales d’un peuple avec une identité propre qui réclame pour soi la souveraineté de décision ; elle est par conséquent éloignée des théories qui prennent l’unité de l’État pour un fait immuable et une réalité établie une fois pour toutes. La différence entre ces deux approches ne concerne ainsi pas seulement le « quantum » du gouvernement autonome qui en résulte, mais aussi et avant tout qui est le dépositaire de la souveraineté politique en Euskadi (les citoyens basques ou tous les citoyens de l’État espagnol).
4. La souveraineté partagée implique une modification du modèle d’État. Il s’agit d’un concept qui s’adapte bien au temps politique de la construction européenne (qui part de la souveraineté des États nationaux pour déléguer vers le haute les compétences supranationales et les souverainetés partagées avec d’autres États), pour articuler sur cette base un type de relations entre les nationalités de l’État espagnol basé sur cinq critères fondamentaux de la démocratie :
— la reconnaissance du droit à l’autodétermination ;
— la reconnaissance de la plurinationalité de l’État ;
— le renoncement de l’État à la vieille idée de l’assimilation nationale autour de la communauté ethno-culturelle castillane ;
— la non-ingérence en ce qui concerne le gouvernement autonome des nationalités ;
— et la construction d’une nouvelle culture de la solidarité, d’accord et de consensus pour concerter les projets et les politiques relevant de l’intérêt commun.
Mais pour que puisse fonctionner un système de souveraineté partagée, des clauses de garantie, permettant de résoudre les conflits sans qu’il soit nécessaire de remettre à chaque fois en question l’ordre juridique, sont nécessaires. De ce point de vue la proposition d’une Commission paritaire n’est pas une garantie suffisante car elle pourrait être bloquée par l’action unilatérale de la partie la plus forte (dans ce cas par l’État espagnol). Le gouvernement basque devrait en tenir compte et proposer à la place d’autres formules, telle la reconnaissance du droit de veto des institutions basques sur tous les règlements qui affectent sa souveraineté, car ce n’est qu’ainsi qu’il pourra éviter les tendances de l’État visant à envahir les compétences du gouvernement autonome.
5. C’est une proposition de coexistence avec les peuples d’Espagne dans un cadre d’égalité. Ce n’est pas une proposition dirigée contre l’Espagne ni contre les Espagnols, mais contre l’idée de l’Espagne telle qu’elle est proclamée par la droite conservatrice et le nationalisme espagnol. Il s’agit d’une proposition d’unité politique fondée sur la reconnaissance de la diversité, le respect mutuel avec des rapports sur un pied d’égalité. Par ailleurs, la formule de souveraineté partagée correspond bien aux sentiments d’identité duale qui existent dans la majorité de la société basque. A une identité duale (basque et espagnole) correspond la formule politique de souveraineté partagée dans un cadre politique de type confédéral, un cadre qui à la fois garantit la souveraineté exclusive dans tous les domaines que les citoyens d’une nationalité veulent conserver pour eux-mêmes et permet une relation avec les peuples d’Espagne dont beaucoup de Basques se sentent partie prenante.
C’est une formule qui permet d’établir les bases d’un accord intérieur à la société basque pour gérer les différences identitaires d’une manière pacifique et non antagoniste, bien que la proposition du Lehendakari analysée sous cet angle reste un peu courte. Le préambule du nouveau Statut ne devrait pas se limiter à seulement mentionner la pluralité d’identités, de même que l’articulation des droits ne devrait pas se limiter à énoncer seulement les droits civiques universels. Outre cela, il manque la construction à partir du basquisme d’un discours dirigé vers ceux d’entre nous qui se sentent espagnols pour construire en commun une communauté politique respectueuse de la pluralité et de la différence.
Le fait que les institutions basques aient élaboré une conception civique de la nation, comme nous l’avons décrit plus haut, facilite néanmoins les choses, même s’il n’est pas bien compris car il n’insiste pas suffisamment sur le discours d’intégration citoyenne, qui reste implicite.
Si l’on veut obtenir l’appui ou du moins la neutralité de ceux qui se méfient de la proposition, la première chose à faire c’est de disperser les craintes de ceux qui se sentent obligés de devenir différents de ce qu’ils sont, c’est-à-dire de leur offrir la garantie absolue du respect de leurs identités métissées ou différentes de l’identité basque.
Un discours d’intégration nationale doit avant tout se fonder sur l’idée de plus de démocratie pour tous, ce qui signifie plus d’autogestion, moins d’ingérence de l’État, et une relations plus forte et meilleure avec les peuples d’Espagne. D’abord, parce qu’un grand nombre de citoyens basques sont originaires des terres d’Espagne, ce qui implique des liens culturels, affectifs, familiaux et sociaux que nous avons non seulement l’obligation de respecter mais que nous devons cultiver en tant que rapports de bon voisinage. Le caractère hétérogène et hybride de la société basque exige d’affronter les problèmes de la coexistence des citoyens en ajoutant au principe de la démocratie libérale (le droit d’expression et le pouvoir de décision des citoyens) deux autres critères de la démocratie qui sont trop fréquemment oubliés : le respect des décisions majoritaires par la minorité (afin d’éviter que la minorité espagnoliste ne devienne une minorité de blocage en s’appuyant sur la force de l’État espagnol) et l’exigence de la part de la majorité d’une politique de main tendue, de respect et d’incorporation de la minorité dans le consensus de gestion collective des questions publiques.
6. C’est une proposition qui apporte davantage de démocratie. D’abord, parce qu’elle transfert la souveraineté politique des Cortes aux citoyens basques et parce que l’exercice de ce droit mettrait fin aux rapports de domination imposés par l’État espagnol aux peuples d’Espagne. La proposition de plus de souveraineté équivaut dans tous les cas à plus d’autonomie de gouvernement. Dans le cas présent elle équivaut aussi à plus de démocratie. Et cela pour plusieurs raisons :
— car elle élimine l’ingérence étrangère d’un État réactionnaire ;
— car la reconnaissance de la souveraineté des nationalités brise le structure du pouvoir du nationalisme d’État (espagnol) construit par le droite ;
— car le gouvernement autonome d’un petit pays avec une société civile très organisée et participative comme dans notre cas, implique une plus grande proximité du gouvernement envers les citoyens et une plus grande capacité de contrôle sur lui.
7. Mais elle n’apporte pas toute la démocratie possible. D’abord parce qu’elle ne se préoccupe pas d’articuler une nouvelle relation intérieure entre le pouvoir politique (le Gouvernement basque dans ce cas) et la société civile. Et ensuite, parce qu’elle n’incorpore pas à l’ordre juridique le noyau central des droits sociaux.
Le nouveau statut doit améliorer la qualité de la démocratie et, pour que cela soit possible, il faut incorporer à l’ordre juridique les mécanismes directs de participation citoyenne dans la prise des décisions politiques sur toutes les questions d’intérêt général. Cela signifie des consultations citoyennes et des référendums astreignants (que le gouvernement est obligé de mettre en œuvre), nécessaires non seulement pour résoudre les questions relatives aux rapports entre la nationalité et l’État, mais aussi pour décider des questions relatives à la bonne gestion de la société basque. La politique fiscale, les priorités des dépenses publiques, les investissements dans les infrastructures, etc., sont des question dont doivent décider les citoyens et non les gouvernements. Les mécanismes pour ce faire sont la consultation, la participation à l’élaboration des budgets et le référendum. Quelque chose de similaire concerne l’exigence des compétences du gouvernement autonome en matière de justice. A quoi sert une telle compétence si on ne change pas la législation sur les partis, afin que tous soient légaux, ou le droit pénal pour abolir les législations injustes et pour que tous nous soyons égaux devant la loi ?
8. Ni la justice sociale nécessaire. regardée de ce point de vue la proposition du Lehendakari laisse les choses en état d’injustice et d’inégalité comme aujourd’hui. Les plus grandes compétences du gouvernement autonome revendiquées en matière du travail et de sécurité sociale ne seront pas utilisées pour mettre en œuvre des politiques de redistribution du travail et de la richesse. La qualité de l’emploi (précarité du travail), la qualité de la vie (relation entre les revenus, les frais et la couverture sociale de chaque personne considérée individuellement) et la justice sociale resteront ainsi les grandes questions en suspens du gouvernement autonome basque. Il s’agit là d’un problème en soi, qui contribue en outre à priver de la légitimation sociale le projet de souveraineté partagée tel qu’il est présenté.
L’adhésion aux revendications nationales a toujours été plus forte lorsque ces dernières allaient de pair avec les revendications démocratiques (opposition à des régimes dictatoriaux) ou celles de justice sociale (réappropriation des ressources économiques et politiques de redistribution sociale), mais dans notre cas elles sont seulement associées à l’idée du « plus de démocratie » et complètement dissociées de la revendication d’une plus grande justice sociale de telle sorte que le degré d’adhésion suscité n’est ni le plus général, ni le plus enthousiaste.
En tenant compte du fait que les questions sociales sont des facteurs de légitimation aussi importants, voire plus importants, que les autres facteurs comme l’idéologie ou l’identité nationale, le gouvernement basque dispose ici d’un superbe outil pour obtenir le consensus qui lui manque encore. Mais le fait qu’il ne se différencie en rien des politiques néolibérales des États environnants restreint la crédibilité de sa proposition de souveraineté. Le fait que ce gouvernement gouverne comme les autres en faveur des classes sociales les plus riches conduit nombre de citoyens à rester étrangers à son projet politique. C’est particulièrement le cas de la partie de la société qui ne s’identifie pas à l’idée de la construction nationale basque ou qui est indifférente à son égard. En fin de compte, pourquoi devraient-ils manifester leur intérêt envers une réforme politique qui au lieu d’apporter des améliorations substantielles à leur vie quotidienne apportera seulement un conflit plus aigu avec l’État (espagnol) ? Pour intéresser cette partie de la société au nouveau projet de souveraineté partagée il manque dans la proposition du gouvernement basque une offre de pacte social adressée à tous les syndicats sans distinction, à tous les mouvements sociaux et à tous les collectifs citoyens, qui reprendrait dans le nouvel ordre juridique proposé le noyau central des propositions formulées dans la Charte des droits sociaux actualisée et étendue. A savoir : la mise en place d’une législation socioprofessionnelle qui réduise la durée du travail hebdomadaire à 35 heures, élimine les formes précaires d’embauche, pénalise le recours patronal aux heures supplémentaires, abaisse l’âge de la retraite, rende les femmes, les jeunes et les immigrés égaux en droits avec les autres ; l’établissement d’un revenu de base pour tous, équivalent au salaire minimum actualisé ; la garantie d’un logement digne et bon marché par l’application d’une loi sur le sol urbain qui pénalise la spéculation immobilière.
9. Et c’est une proposition qui libère la gauche espagnole des liens qui l’attachent au discours totalitaire de la droite nationaliste parce qu’elle ouvre une nouvelle perspective au fédéralisme espagnol au point de lui offrir la possibilité de résoudre en même temps la crise d’identité nationale de la gauche espagnole et d’acquérir son autonomie politique face à la droite. Elle lui offre une nouvelle manière de voir, qui lui permet de s’approcher de l’identité espagnole tout en la coupant de sa relation ancienne avec l’État unitaire. Une manière de voir qui renonce à l’État en tant que patrimoine exclusif de la communauté ethno-culturelle castillane. Les peuples d’Espagne seront des peuples libres dans la mesure où ils s’éloigneront du nationalisme et s’approcheront des nationalités sans État dans le respect de leurs différences. La régénération démocratique de la société exige une nouvelle direction des gauches et pour que cela puisse se produire il faut une rupture avec la structure du pouvoir construite par le « nationalisme d’État », d’autant plus agressif et violent que s’affaiblit sa capacité d’imposer l’homogénéité nationale espagnole de tout « son territoire ». La réalisation du « plan Ibarretxe » permet ainsi de résoudre un des déficit démocratiques de la transition espagnole (la reconnaissance du droit d’autodétermination des nationalités), ce qui implique à son tour une démocratisation générale de l’État. Ne serait-ce que pour cette raison, il doit être intégré au programme politique des gauches. cela permettra à son tour à la « minorité constitutionnaliste » de la société basque de cesser de se comporter comme une minorité réactionnaire de blocage du droit des citoyens basques à décider librement de leur futur national.