Compte tenu de la trajectoire particulière qui fut celle de Jean-Marie Vincent dans le paysage du marxisme français, il est nécessaire de s’engager dans un travail pluriel de réflexion sur son oeuvre, qui croise aussi une histoire politique. J’ai fréquenté Jean-Marie Vincent à la Ligue, dont il fut membre de 1972 à 1981, mais notre dialogue a été important ( du moins, me semble-t-il) par la suite, à partir de la première moitié
des années 1990. J’ai réalisé de nombreux entretiens avec lui pour Critique communiste ou, tout simplement, je lui ai demandé des articles. J’ai moi-même écrit des articles discutant certains de ses développements. Mon trajet marxiste doit beaucoup à la lecture de Marx qu’il propose. Il a écrit une longue préface à mon livre Marx, l’Etat et la politique (Syllepse, 1999). Mon autre livre, Travail et émancipation
sociale, Marx et le travail (Syllepse, 2003), fait explicitement référence à son élaboration sur ce thème. Il en avait fait un compte rendu discutant dans l’Humanité.
On comprendra que, pour ce qui me concerne, je n’ai pas envie de me livrer à un compte rendu quelque peu académique de son oeuvre, mais de poursuivre les échanges - malheureusement sous forme de monologue - à travers une sorte de chronique de trajets politiques et théoriques qui se croisent souvent sans être les mêmes. En poursuivant les thèmes déjà traités dans un article de Rouge (n° 2062) écrit juste après sa mort : le fétichisme de la marchandise et un retour sur le
marxisme révolutionnaire. Jean-Marie Vincent y apparaît tel qu’il a compté pour moi. D’autres ont sans doute entretenu un rapport différent à son oeuvre et à son histoire politique. Pour des raisons « techniques », il m’a semblé préférable de traiter ces deux thèmes, qui sont en rapport, sous la forme de deux articles séparés. Ainsi, s’il le
souhaite, le lecteur peut lire directement celui intitulé « Retour sur le marxisme révolutionnaire » qui est d’une nature un peu différente de celui intitulé « Le marxisme comme théorie critique ».
Jean-Marie Vincent, un penseur obstiné