S’il fallait une confirmation de l’absence de volonté des directions syndicales à chercher la moindre confrontation avec le patronat et le gouvernement, les événements de ces derniers jours l’ont fournie sans aucune ambiguïté.
Malgré les mobilisations exceptionnelles des 29 janvier et 19 mars, les directions syndicales n’ont pas fait le moindre geste qui puisse laisser espérer une inflexion même minime de leur politique. L’annonce d’un 1er mai unitaire comme seule réponse, puis la confirmation dans un communiqué signé également par la FSU et Solidaires le lundi 30 mars qu’il n’y aura rien d’autre à espérer pour la suite qu’une nouvelle grève interprofessionnelle au mieux, ou peut être simplement une « mobilisation un samedi », tout cela prend évidemment l’allure d’une dérobade destinée avant tout à décourager celles et ceux qui auraient envie de se battre.
Le fait de demander à Sarkozy d’être le porte-parole des travailleurs lors du G20 a également une signification bien précise : au moment où celui-ci joue les matamores à deux sous en menaçant ses confrères de claquer la porte si la « voix de la France » n’est pas entendue, cela revient inévitablement à donner une certaine légitimité à une comédie pourtant évidente aux yeux de tous !
La compréhension qu’il n’y a plus rien à attendre des directions syndicales, les salariés, d’une certaine manière, l’ont déjà exprimée le 19 mars. Ce n’est pas pour rien que les taux de grévistes ont diminué presque partout, notamment dans la fonction publique, alors que le nombre de manifestants a encore augmenté, incluant un grand nombre de travailleurs du privé. Perdre une nouvelle journée de salaire à l’occasion d’une nouvelle manifestation sans lendemain n’est pas forcément indispensable. Et la réponse du NPA dans ces conditions n’est pas forcément d’aller réclamer une journée supplémentaire, le plus vite possible, avant le 1er mai.
Car pour être efficace, une nouvelle journée supposerait qu’elle s’inscrive avec l’objectif clairement affiché de faire le lien entre les secteurs les plus résolus déjà partis dans la grève reconductible, et ceux qui ont encore besoin de rassembler leurs forces, afin de préparer un « tous ensemble » et aller vers la grève générale.
Or ce n’est pas ce que veulent les directions syndicales, pas davantage celles de la FSU et de Solidaires qui au mieux se contentent de critiquer l’inaction des grandes confédérations, sans proposer d’autres alternatives au nom de l’unité. Quant à donner nous même une telle signification à une nouvelle journée, cela supposerait un autre rapport de force que nous n’avons pas encore. C’est justement cela qu’il nous faut construire sans attendre.
On assiste aujourd’hui à la montée d’une véritable exaspération sociale, avec une augmentation significative du nombre de grèves dures comme l’a montré encore récemment l’action des salariés de Caterpilar. De telles actions ne suffisent pas à changer le rapport de force. Mais elles révèlent sans doute au-delà de la seule colère — et parfois du désespoir — que de nouvelles opportunités existent mais aussi de nouveaux défis
Le premier est évidemment d’arriver à faire le lien entre tous ces secteurs pour l’instant très isolés, ce qui supposerait pour le NPA d’avoir des camarades présents dans les luttes et donc dans les usines susceptibles comme Danone en 2001 de cristalliser le mécontentement autour d’une initiative nationale de lutte pour l’interdiction des licenciements.
Le second serait à une échelle beaucoup plus large de convaincre et d’organiser des travailleurs, des militants combatifs autour d’une politique réellement indépendante des directions syndicales, de telle sorte que l’objectif d’une nouvelle journée ne soit pas un cul de sac ou un échappatoire, mais bien un tremplin pour aller vers une généralisation des luttes.
Des initiatives ont déjà eu lieu en ce sens, au Havre, à Saint-Denis, à Valenciennes en lien avec des syndicalistes de la CGT, de Solidaires, de la FSU, des travailleurs de la métallurgie, des cheminots, des chômeurs, des enseignants des étudiants...
Cela montre que c’est possible, et que nous pouvons essayer d’impulser partout de tels comités, pour clarifier ce qu’il y a d’essentiel aujourd’hui : une compréhension commune sur la crise et la politique des classe dominante dans la nouvelle période, comme sur celle des directions syndicales, la nécessité d’une organisation démocratique dans les luttes, des revendications claires et mobilisatrices, la volonté de généraliser la grève et de tout faire pour unifier les forces du monde du travail.
Cette unité, nous la proposons à celles et ceux qui veulent en découdre avec le patronat et le gouvernement, sans à priori sur les organisations. L’essentiel, l’urgent est de changer le rapport de force à la base.