Macron et le show du remaniement, « un gouvernement de combat » pour « la relance »… des profits

, par LEMAÎTRE Yvan

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« Un gouvernement de dépassement et de combat », pour « se battre pour l’emploi et la reconstruction », c’est ainsi que se définit la nouvelle équipe au pouvoir animé, dixit, du « patriotisme républicain ». Rien de bien nouveau depuis que Macron a pris la pose du chef de guerre. Il a resserré ses troupes tout en prenant ses distances avec son parti en débandade et s’agite pour masquer sa propre faillite. Les médias aux ordres mettent en musique le show gouvernemental en promotionnant le retour de Roselyne Bachelot, déjà ministre sous Sarkozy, sans doute une digne représentante de leur France d’après. Lui dispute la vedette l’avocat Dupond-Moretti, parait-il de gauche, Le Pen l’aurait même qualifié d’extrême gauche ! Cependant connu entre autres pour ses propos et jugements machistes dénoncés par les féministes comme la nomination de Darmanin au ministère de l’intérieur alors qu’il est visé par une plainte pour viol ! Le « remaniement de la honte » disent les féministes !

Quant au nouveau premier ministre, Jean Castex, il vient de chez Les Républicains comme son prédécesseur. Sorti de l’ENA, il est de ces hauts fonctionnaires tout dévoués à la bourgeoisie et à l’ordre établi. L’un de ses actes de gloire est d’avoir fait passer la tarification à l’activité (T2A), cette gestion comptable qui a ruiné l’hôpital public et contre laquelle les hospitaliers se mobilisent depuis des mois. Bon exécutant de son patron, il ne s’exprimera devant l’Assemblée qu’après que ce dernier aura fait le spectacle pour le 14 juillet.

Par cette mise en scène, Macron voudrait faire oublier la débâcle présidentielle des municipales, son discrédit total, et mieux faire avaler le plan de bataille contre les travailleurs et la population pour tenter d’éviter la faillite annoncée de l’économie du profit et de la concurrence.

Ce gouvernement est aussi un gouvernement de campagne électorale pour faire de Macron le candidat de toute la droite y compris de l’électorat d’extrême droite. Le nouveau ministre de l’intérieur, bon élève zélé, s’empresse de vanter son ministère, celui « de la protection des Français » donc par là même « le premier des ministères sociaux » tout en flattant les fantasmes de l’extrême droite : « Nous devons combattre de toutes nos forces l’islamisme politique qui attaque la République. »

Quant à Barbara Pompili, elle est là pour le décorum et ne fait pas plus illusion que Nicolas Hulot…

Leur seule boussole, c’est le CAC 40, la bourse et les profits

Qu’importe le nouveau casting du spectacle politicien, ce gouvernement est bien un gouvernement de combat contre les classes populaires pour que la Bourse continue de monter. Macron tient à ne laisser aucune illusion en remettant à l’ordre du jour sa réforme des retraites et, en priorité, le financement du régime actuel. En annonçant aussi sa politique dite de relance économique qui renforce les aides au grand patronat, des milliards distribués sans contrepartie. Castex nous parle d’un nouveau « pacte social », il a reçu l’ensemble des organisations syndicales la semaine passée, mais là encore, c’est la continuité du jeu de dupes du dialogue social pour imposer par le chantage à l’emploi l’allongement du temps de travail, la baisse des salaires, et la réforme de l’assurance-chômage qui prévoit de réduire la durée et le montant des indemnisations des chômeurs.

Et, bien évidemment, il n’y aura pas de retour de l’ISF. Le ministre de l’Economie veut baisser les impôts qui touchent la production des marchandises, au nom de la relance c’est à dire pour soutenir les profits. Sont visées la CVAE (contribution à la valeur ajoutée des entreprises), 14 milliards en 2018, perçue par les régions, et la C3S (contribution sociale de solidarité des sociétés) 3,8 milliards, perçue par l’Etat.

A l’opposé, le gouvernement a décidé la hausse de la CRDS, cotisation prélevée sur les salaires pour rembourser la dette sociale, qui devait s’éteindre en 2024 et sera prolongée d’au moins dix ans.

Des milliards pour licencier

Les premiers effets de cette relance capitaliste sont une vague de licenciements sans précédent, Renault, Airbus, Air France, Sanofi, Hutchinson, filiale de Total, Nokia… Selon le décompte publié par la Dares – la direction des études du ministère du travail – avant même les annonces chez Airbus, Nokia ou Air France – 143 plans de licenciements, les dits « plans de sauvegarde de l’emploi », PSE, ont été lancés en France, menaçant 19 287 emplois, sans compter les 1 344 procédures de « petits » licenciements collectifs (moins de dix salariés ou dans des TPE) répertoriés à la fin juin, ou les centaines de milliers d’intérimaires dont la mission a pris fin.

Le nombre total d’heures travaillées s’est effondré, diminuant dix fois plus vite au cours des trois derniers mois qu’au cours des trois premiers mois de la crise de 2008. Les femmes et les jeunes sont les plus durement touchés.

Les milliards que l’Etat distribue visent à augmenter la compétitivité et la rentabilité financière des entreprises au mépris des travailleurs et de la population. Loin de sauver l’économie, ils ne servent qu’à sauver les profits avec au bout le risque d’un krach financier.

Les « héros » méprisés

Si en quelques jours l’Etat a su trouver 7,5 milliards pour Air France, il aura fallu plus de six semaines de négociation bidon pour que le Ségur de la santé accouche d’une augmentation de salaires pour les hospitaliers qui est bien loin du compte : une revalorisation « socle » de 180 euros net mensuels pour tous les personnels hospitaliers non médecins des secteurs public et privé non lucratifs en deux temps : 90 euros au 1er septembre, puis 90 euros en mars 2021. 15 000 embauches sont promises dont la moitié seulement représenterait des créations de postes, l’autre moitié correspondrait à des titularisations. Et en prime, l’accord prévoit des dérogations et un « assouplissement » des 35 heures et introduit l’intéressement à l’hôpital public...

On est loin des 300 euros pour tous et des 100 000 embauches demandés par les hospitaliers qui seront dans la rue, le 14 juillet, pour exiger leur dû face à la farce de l’hommage hypocrite que Macron leur apporte.

L’unité du monde du travail contre la dictature de la finance

Dans le pays les conflits se multiplient en premier lieu contre les licenciements. Plusieurs milliers de salariés d’Airbus manifestaient mercredi. Des manifestations ont aussi eu lieu à Saint-Nazaire et à Nantes, deux autres sites du groupe frappés de plein fouet. Plusieurs centaines de personnes se sont rassemblées le même jour devant le site de Hop !, filiale régionale d’Air France, pour protester contre la fermeture de celui-ci, manifestation aussi des salariés de Nokia.

La CGT a annoncé une journée de grève et de manifestations pour le 17 septembre. La lutte contre la vague de licenciements et l’explosion du chômage à la rentrée ne peut rester une lutte secteur par secteur. Il faut interdire les licenciements et répartir le travail entre toutes et tous pour travailler moins en fonction des besoins réels. Cela implique de contester la logique financière de la Bourse et des banques qui impose sa dictature à toute la société.

La bourgeoisie et son État mettent un œuvre un plan global pour réorganiser la production en fonction des seuls impératifs de rentabilité financière et de compétitivité. Il va toucher l’ensemble du monde du travail qui a besoin d’un plan d’ensemble à opposer au leur, un plan qui remet en cause la logique financière, le profit et la concurrence, pour produire en fonction des besoins de la population et des contraintes écologiques. Cela passe par notre mobilisation, la prise en main de nos propres organisations syndicales, associations, notre organisation sur les lieux de travail et d’habitation pour faire vivre la démocratie, notre droit de contrôler et de décider de la marche de la société.