Pour Tzipi Livni, l’actuelle ministre des Affaires étrangères de l’État sioniste, l’abjecte et sanglante offensive engagée depuis le 27 décembre dernier par l’armée d’Israël aurait pour but de « changer la donne dans la région ».
Par delà les calculs et ambitions électorales à la veille des élections législatives, cette escalade dans la terreur contre 1 500 000 Palestiniens affamés, pris sous le feu des bombes tirées par les avions de guerre ou l’artillerie de l’armée de terre, enfermés dans la plus grande prison du monde, vise non seulement à briser la résistance du peuple palestinien mais, au-delà, à renforcer la position d’Israël en plongeant le Moyen-Orient dans une instabilité plus grande encore que ce qu’il connaît depuis des décennies. Il s’agit de briser toute résistance à Gaza pour mieux alimenter les tensions en Cisjordanie et, par effet retour, d’affaiblir l’autorité palestinienne et les régimes arabes complices déstabilisés par l’inévitable montée de la contestation populaire et l’agitation des courants religieux et intégristes. Comment imaginer que l’onde de choc de l’agression israélienne puisse épargner le Liban, l’Égypte ou la Syrie, d’autant que cette sinistre agression est une revanche par rapport à la défaite de l’armée israélienne au Liban l’été 2006. Il n’a pas fallu longtemps pour qu’interviennent des bombardements contre le Liban. Il s’agit de déstabiliser l’ensemble de la région pour imposer Israël comme seule force de stabilité et d’ordre pour les intérêts impérialistes mais aussi pour ceux des classes dirigeantes arabes soumises et intégrées à la politique d’Israël et des grandes puissances.
Cette stratégie, même si elle n’est pas directement commanditée par la Maison blanche et le Pentagone, s’inscrit pleinement dans la leur, celle de « la guerre sans limite », « du chaos constructeur », une politique permanente d’agression pour déstabiliser les adversaires réels ou potentiels, rendre tout compromis impossible. Ce fut leur politique vis-à-vis de l’Irak, puis de l’Afghanistan, une stratégie de la fuite en avant militaire qui entretient les conflits locaux et pourrait demain menacer à nouveau d’une généralisation des conflits.
Le fait que l’agression israélienne intervienne au moment même où la crise financière et économique se mondialise à travers les débuts d’une récession n’est pas une coïncidence fortuite mais résulte des choix politiques des dirigeants israéliens. L’exacerbation des tensions au Moyen-Orient est une des conséquences des tensions financières et économiques internationales. Les dirigeants israéliens peuvent penser que le contexte leur est favorable du fait que les USA s’engagent toujours plus avant dans leur stratégie de guerre sans limite en envoyant 30 000 soldats supplémentaires en Afghanistan ou par les manœuvres diplomatico-militaires autour de l’OTAN dont la Géorgie a été un des théâtres.
Contrairement à une analyse répandue, il ne s’agit pas pour eux de forcer la main à une administration américaine supposée être en train de changer de politique avec l’arrivée d’Obama aux affaires. Cette analyse participe des illusions entretenues sur la capacité d’Obama à changer la politique des classes dirigeantes américaines. Au mieux essaiera-t-il d’en changer l’emballage mais, en aucun cas, le fond. Il s’est d’ailleurs jusqu’alors bien gardé de la moindre déclaration allant dans ce sens. Les classes dirigeantes américaines n’ont qu’un souci, préserver leurs privilèges d’empire dominant le monde au moment où la crise ébranle cette domination. Si Wall-Street a choisi Obama c’est parce qu’elle pense qu’il est le mieux placé pour conduire une telle politique, la faire accepter. Israël, dans la continuité de ses relations avec l’impérialisme dominant, avec toute son histoire, assume son rôle d’État place forte de l’impérialisme au Moyen Orient, son bras armé, au mépris de son propre peuple qu’il n’a cessé d’enfermer dans un piège que seul le peuple lui-même pourrait rompre.
Sans qu’il soit possible d’anticiper sur les développements ultérieurs de la situation créée par l’agression israélienne, celle-ci participe du tournant de la politique internationale qui s’opère dans le cours même de la crise.
Les déclarations hypocrites des dirigeants des grandes puissances qui demandent un cessez-le-feu tout en accusant cyniquement le Hamas de la responsabilité « impardonnable » de l’agression israélienne, le zèle déployé par Sarkozy, visent à entretenir le doute sur leurs véritables intentions, mais elles laissent indifférent le gouvernement israélien qui entend aller le plus loin possible dans sa sinistre besogne. On ne peut bien évidemment que souhaiter et exiger l’arrêt du massacre, de l’offensive israélienne, mais, hors d’une mobilisation radicale de l’opinion mondiale, des travailleurs et des peuples, si le gouvernement israélien acceptait une nouvelle trêve, ce ne serait qu’avec l’assurance de pouvoir l’utiliser pour consolider ses positions, désarmer le Hamas, assurer son contrôle sur Gaza en particulier grâce au contrôle de la frontière avec l’Egypte que Sarkozy aurait obtenu de Moubarak.
La mobilisation contre l’agression israélienne, pour l’arrêt des massacres, la défense des droits du peuple palestinien, relève de l’intérêt des travailleurs et des peuples du monde entier. C’est la mobilisation contre la politique des classes dominantes dans ses conséquences les plus dramatiques, mais qui sont dans la logique même des rapports de classes fondés sur l’exploitation, l’oppression, la domination pour l’appropriation privée des richesses.
Les manifestations qui ont eu lieu ici comme partout dans le monde, en Israël même, sont source d’espoir, les signes d’un nouvel essor du mouvement ouvrier et populaire contre les ravages, la crise humanitaire globale qu’entraîne la politique libérale et impérialiste.
Tous nos vœux vont au renforcement de ces mobilisations, de la solidarité internationale par delà les frontières.
Ainsi, l’étalage aveugle et sanglant de force militaire, de capacité de destruction auquel se livrent les dirigeants de l’État sioniste en détruisant les vies des enfants, des femmes, des hommes palestiniens, pourrait bien contribuer à une large politisation, une prise de conscience internationaliste. Leur victoire militaire momentanée sera, n’en doutons pas, l’aveu de leur terrible échec politique, de leur mépris des droits des peuples, de celui d’Israël lui-même.
La vérité s’impose à tous, insupportable, la logique des rapports de forces, de la stratégie impérialiste des USA et de leurs alliés qui ne laissera à personne d’autre choix que de se soumettre ou de la combattre.
La concordance des temps entre l’approfondissement de la crise mondiale du capitalisme et la mise en œuvre de l’abject plan d’Israël traduit la globalité de cette crise, l’interdépendance des phénomènes économiques, politiques, internationaux, diplomatiques et militaires. La politique libérale, ce n’est pas moins d’État, mais un État totalement soumis et intégré à la stratégie des classes dominantes. Plus que jamais, les gouvernements sont les exécutifs des intérêts des classes dominantes, les armées l’instrument de la défense de l’économie de marché et des intérêts de ceux qui en tirent les ficelles.
La mobilisation en cours, les prises de conscience qu’elle entraîne auront à tirer les leçons du drame du peuple palestinien, des discours hypocrites des pseudos démocraties impérialistes qui laissent faire ces massacres, mais également de l’impasse de la démagogie nationaliste des bourgeoisies arabes dominées par l’impérialisme mais qui craignent tout autant que lui l’indépendance des masses, cette démagogie qui, de rodomontades en défaites, a enfermé le peuple palestinien dans un piège sanglant.
La solidarité, c’est aussi dire cela, dénoncer le piège du nationalisme pour mettre en œuvre une solidarité internationaliste consciente que les droits démocratiques des peuples, dont celui de pouvoir posséder son propre État, ne peuvent être conquis et garantis que par les travailleurs, les opprimés unis dans un même combat.
Le mouvement d’émancipation national et social des peuples opprimés ne pourra retrouver vigueur que s’il se trouve en son sein des femmes et des hommes capable de briser le carcan du nationalisme, la chape de la religion, pour trouver le chemin de la lutte de classe internationaliste.
Alors, oui, l’enjeu de 2009 est de regrouper toutes les forces d’ores et déjà disponibles pour s’engager résolument dans ce combat internationaliste, ici, en France, comme au niveau de l’Europe pour ce qui relève de nos responsabilités les plus immédiates. C’est une bataille politique d’importance qui implique une totale indépendance avec toutes les forces qui, d’une façon ou d’une autre, continuent de véhiculer le nationalisme.
Notre solidarité, notre révolte sont aussi ce combat internationaliste. Le combat pour la paix, le progrès, la démocratie ne connaît pas de frontière. C’est bien pourquoi la mobilisation pour arrêter le bras des bourreaux du peuple palestinien, pour défendre son droit à un État, participe de la propre lutte contre notre propre impérialisme.
Contre l’agression libérale et impérialiste, pour que 2009 voit le début d’une contre-offensive des travailleurs et des peuples